Vaincu par Readly Express dans le Grand Prix d’Amérique, le crack de Pierre Pilarski s’est préparé idéalement dans l’optique de l’Elitloppet en gagnant coup sur coup le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur et le Grand Prix de l’Atlantique. A une grosse semaine du Prix d’Amérique suédois, son propriétaire évoque les derniers préparatifs du champion et n’élude, comme à l’accoutumée, aucune question.
Pierre Pilarski veut gagner l’Elitloppet. Pour Bold Eagle avant tout mais aussi pour les très nombreux fans de son cheval, en France et en Scandinavie. Les derniers préparatifs, le meeting d’hiver de Vincennes Hippodrome de Paris, Franck Nivard, l’opposition en Suède ou encore l’étalon Bold Eagle sont autant de sujets qu’il aborde avec son franc-parler.
Pierre, comment se sont déroulés les derniers entraînements de Bold Eagle ?
Pierre Pilarski (PP) : « Le cheval est au top. C’est un Bold Eagle retrouvé que Sébastien Guarato entraîne au quotidien et ses derniers boulots sont très bons. Le cheval reste sur deux excellentes sorties, dans le Critérium de Vitesse à Cagnes-sur-Mer où, en dépit de son numéro à l’extérieur, il a montré qu’il était toujours aussi performant, ce qu’il a confirmé dans le Prix de l’Atlantique. Le seul hic, c’est que son abcès au pied s’est rouvert après Cagnes-Sur-Mer, où il avait couru avec des aciers plats. Aussi à Enghien, Sébastien l’a muni de plaques et d’ « alus star », c’est-à-dire des fers en aluminium qui couvrent toute la surface du pied pour éviter que l’abcès se rouvre. C’est dans cette configuration qu’il courra le 27 mai prochain à Solvalla. »
Est-ce que Sébastien Guarato l’a conditionné à l’entraînement pour que Bold Eagle soit prêt à courir deux courses le même jour ?
PP : « Je ne suis pas bien certain que Bold Eagle n’ait pas compris l’an passé qu’il devait courir la batterie et la finale. A mon sens, c’est nous, l’entourage du cheval, qui lui avons envoyé de mauvais signaux. Lui avoir fait faire le jour J cinq entrées en piste avec des double heat, le doucher complètement après sa batterie, ce n’était pas la bonne option. On l’a tout bonnement sorti du match et c’était nous l’erreur, pas lui. Mais je n’aime pas entendre que « Bold » a perdu la finale. Certes, on y a été un peu fort dans la demi-finale mais c’est Timoko et un très grand Björn Goop qui gagnent cette finale. On s’est focalisé sur Nuncio et on a eu tort. Par conséquent, pour en revenir à votre question initiale, il n’y pas eu de changement dans la préparation de Bold Eagle. »
L’an passé, vous aviez « dépaysé » Bold Eagle en le stationnant dans un haras à une centaine de kilomètres de Solvalla. Est-ce que ce sera le cas cette année ?
PP : « C’est moi qui l’avais décidé car je souhaitais que mon cheval soit au calme et qu’il ne soit pas importuné par trop de visiteurs. Vous me connaissez, j’ai toujours ouvert la porte du box de « Bold » mais là, ça me gênait car ça risquait de faire trop pour le cheval, d’autant que plusieurs opérateurs de voyage avaient organisé des visites des participants à l’Elitloppet, avec des risques potentiels de contamination. Je voulais qu’il soit au vert, seul avec son lad Hugues Monthulé. Cette année, Bold Eagle stationnera chez Stig Johansson, au nord de Stockholm, où étaient Timoko et Up and Quick en 2017. »
Avez-vous envisagé de confier Bold Eagle à un autre driver, Björn Goop pour ne pas le citer, dans l’optique de l’Elitloppet ?
PP: « Franck était déçu de ce qui s’est passé lors de la précédente finale et en toute franchise, il ne voulait pas y retourner. Au départ, je m’étais dit que si Franck disait non, alors on n’y retournait pas. Mais pourquoi pas ? « Bold » a le record de la piste de Solvalla quand même ! On aurait pu mettre Björn (Goop) à la place, c’est vrai, d’autant qu’il était disponible. On lui avait d’ailleurs demandé de driver le cheval lors du Prix de Bretagne. Mais jamais je n’aurais mis Björn à la place de Franck (Nivard) et si vous voulez le fond de ma pensée, Björn n’aurait pas accepté. Je l’adore mais si on doit gagner l’Elitloppet, c’est avec Franck et personne d’autre. Ce qui m’a embêté lors du dernier meeting d’hiver, c’est que Franck était à la lutte avec Jean-Michel Bazire pour le Sulky d’Or. Je pense qu’inconsciemment, ça lui a mis une grosse pression. Il me parait évident que pour un pilote, il est bien plus valorisant et important de gagner l’Elitloppet et le Prix d’Amérique, comme l’a fait Björn, que de courir après le Sulky d’Or. »
Est-ce à dire que vous avez pu douter des choix tactiques de Franck Nivard ?
PP : « Dans le Prix de l’Atlantique, j’étais obsédé par cet abcès au pied qui s’était réveillé. A mi-ligne droite, quand Jean-Michel Bazire prend le meilleur avec Bélina Josselyn, je me suis dit : « Mais qu’est-ce qu’il fait ? Pourquoi est-ce qu’il ne tente pas de repartir ? » Et puis Franck a débouché les oreilles de Bold Eagle et il est reparti pour battre Bélina Josselyn. Jean-Michel Bazire a beau être le génie absolu, le meilleur de tous les temps, c’est Franck Nivard qui a gagné et il connait son cheval mieux que personne. Psychologiquement, les deux dernières courses qu’il a données à « Bold » lui ont fait le plus grand bien dans l’optique de l’Elitloppet. Alors impossible de douter de Franck Nivard. »
Vous avez déclaré sur Equidia être déçu par Bold Eagle cet hiver. Est-ce que vous regrettez vos propos ?
PP : « Replaçons les choses dans leur contexte. Cette interview a eu lieu à l’issue du Prix de Belgique. Au-delà de la déception, j’étais surtout inquiet en vue du Prix d’Amérique car pour moi, il était évident que nous n’avions plus la certitude de réussir le triplé. J’étais en plein doute car il n’avait pas lutté comme à l’accoutumée et la suite m’a d’ailleurs donné raison. Mais toutes les courses qu’il a disputées cet hiver l’ont été dans des temps records. On n’a pas eu à chaque fois les meilleurs parcours même si, Readly Express, Bélina Josselyn et Bird Parker ont été exceptionnels. Il n’y a pas à rougir d’être battu par des trotteurs de ce calibre. Ce qui m’a déçu, ce sont les critiques de certains journalistes affirmant que Bold Eagle n’était pas au niveau. Quelqu’un a quand même été jusqu’à me demander si je comptais arrêter la carrière du cheval après l’hiver… On n’a pas le droit d’être déçu d’un crack comme Bold Eagle. J’étais inquiet, c’est tout. »
Parlons de l’opposition à présent. Avec le forfait de Readly Express, est-ce que vos chances de remporter l’Elitloppet sont plus élevées ?
PP : « Je me doutais depuis un moment déjà que Readly Express ne serait pas sur la grille de départ. On ne prépare pas une course comme l’Elitloppet à l’écurie. Je tiens au passage à rappeler que même si nous avons été battus par Readly Express dans l’Amérique, Bold Eagle lui a gagné l’épreuve à 5 ans et n’est pas passé loin de s’adjuger la Triple Couronne la même année. On a l’expérience pour nous et les bookmakers suédois ne s’y sont pas trompés en l’installant favori. Néanmoins, l’opposition n’est pas plus faible que l’an passé. Propulsion sera notre adversaire principal bien qu’il n’ait pour le moment gagné ni le Prix d’Amérique, ni l’Elitloppet. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle je considère que le crack des cracks, c’est Varenne. Parce qu’il a tout gagné partout, et pas qu’une fois. On a toutes les cartes en main, le cheval est au top et même si on tire un très mauvais numéro dans la batterie, ce n’est pas si grave. Ringostarr Treb m’a impressionné lors de sa dernière sortie et je ne sais pas quoi penser de l’australienne Maori Time. Quant à Dreammoko… s’il gagne, alors il faudra ériger une statue à l’effigie de Björn Goop et Richard Westerink ! C’est super pour Richard, un garçon que j’adore en plus, qu’il soit là avec un fils de Timoko. »
Bold Eagle fait l’actualité ces dernières 24h grâce à un sans-faute hier à Caen lors de la séance de qualifications avec quatre produits sur quatre qualifiés. Que ressentez-vous ?
PP : « Il y en a même un cinquième qui vient de se qualifier ce matin (vendredi 18 mai) à Grosbois ! J’ai suivi tout ça en direct sur Province Courses. C’est génial surtout que ses produits évoluent sous quatre entraînements différents, trois pouliches et deux mâles. Dans le pedigree de Bold Eagle, il y a deux des meilleurs reproducteurs européens : Love You et Ready Cash. Tant sur le plan génétique que des performances, Bold Eagle est programmé pour reproduire avec un BLUP (NDLR : indice permettant d’estimer la valeur génétique d’un équidé en prenant en considération ses propres indices de performance, mais aussi celles de ses apparentés) de 75, ce qui est énorme. Sébastien Guarao me l’a souvent dit : on ne verra pas un crack comme lui de sitôt, alors profitez-en bien. Quelque part, c’est déjà un peu derrière nous… mais Thomas Bernereau (NDLR : courtier et copropriétaire de Bold Eagle) me le répète : on aura toujours « Bold » avec nous car il vivra avec sa descendance. En vieillissant, on vit à travers ses enfants, et je sais de quoi je parle puisque j’en ai eu cinq (rires) ! »
Sources : Le Trot
Photo : Scoopdyga
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